Accueil --> Liste des légendes --> Table des chapitres --> Chapitre 12.
Le Cercle Médiéval en police de caractère adaptée

Les légendes d'Ourthe-Amblève

Les quatre fils Aymon

Chapitre XII

COMMENT APRES QUE CHARLEMAGNE EUT ASSIEGE MONTAUBAN, ROLAND ALLA CAMPER VIS-A-VIS DE LA PORTE, DANS UN LIEU NOMME BALENÇON.

Charlemagne sentit bien que le duc Naimes avait raison, il lui dit :
— Je veux me conformer à vos avis.

Aussitôt il fit publier que l'on s'avançât du château le plus près qu'il serait possible. Il ordonna que l'on plaçât sa tente vis-à-vis de la porte. On vit bientôt plus de dix mille tentes autour de Montauban. Quand l'armée fut campée, Roland prit dix mille chevaliers tous jeunes, et alla camper vis-à-vis dans un lieu nommé Balençon, au bord d'une très grande et profonde rivière. II. fit mettre sa tente dans cet endroit avec un dragon au-dessus. Ce lieu était tellement élevé qu'on pouvait découvrir tout le pays. Montauban était environné de deux rivières, la Dordogne et la Gironde. Roland voyant l'endroit si bien fortifié, en fut surpris et dit à ses gens :
— Seigneurs, je ne suis pas surpris que les quatre fils Aymon font la guerre à mon oncle puisqu'ils ont un château si bien fortifié. Jamais nous ne viendrons à bout de Montauban.
— Vous avez tort, dit Olivier, nous avons pris Losannes et avons abattu la grande tour et le donjon de Constantinople, aussi nous pourrons bien avoir Montauban. Et si Regnaut et ses frères ne viennent pas se rendre, leur vie est en grand danger.
— Je vous promets, dit Roland, qu'ils n'en feront rien ; mais je vous jure que Regnaut nous fera telle peur que le plus hardi voudra être à Paris. Il est courageux et ses frères aussi. Ils ont de vaillants chevaliers, aussi je suis d'avis que tant qu'ils auront à vivre, ils ne seront jamais pris.

Quand le pavillon de Roland fut tendu, il aperçut un grand nombre d'oiseaux entre les deux rivières.

Alors il dit à l'archevêque Turpin et aux autres barons :
— Voyez que nous sommes bien logés ; allons chasser avec nos faucons.
— Messire, dit l'archevêque Turpin, très volontiers.

Roland monta à cheval et prit avec lui une trentaine de barons qui emportèrent leurs faucons, montèrent sur des mulets ; ils prirent seulement leurs épées et partirent à la chasse où ils prirent beaucoup d'oiseaux de rivière. L'archevêque Turpin et Oger n'y furent point, mais ils restèrent dans leurs tentes à la tête de l'armée, et interrogeaient un vieux chevalier sur la manière dont on s'était servi pour prendre la grande ville de Troyes. Il y avait un espion de Regnaut qui s'était glissé dans l'armée du roi pour savoir ce qui s'y passait. Il partit aussitôt et alla raconter à Regnaut que Roland et Olivier étaient allés à la chasse avec trente chevaliers bien armés. Regnaut en fut bien aise. Il appela ses frères et Maugis, et leur dit comment Roland et Olivier étaient allés avec trente chevaliers chasser dans les plaines de Balençon.
— Que devons-nous faire, dit Regnaut ?
— Cousin, dit Maugis, il faut les détruire si nous pouvons. Vous souvenez-vous que Charlemagne a dit qu'il laisserait les anciens chevaliers dans son royaume et n'emmènerait avec lui que des jeunes gens, à qui il donnerait toute la Gascogne. Roland et Olivier sont si bien convaincus de la puissance de Charlemagne, qu'ils pensent que personne ne peut leur résister ; mais si vous voulez m'en croire, je vous dirai un moyen de les embarrasser.

Regnaut, ses frères et Maugis s'armèrent. Regnaut monta sur Bayard et le fit caracoler. Il dit ensuite :
— Tâchons de prendre les meilleurs chevaliers de Charlemagne.

Ils sortirent tous bien armés par la fausse porte, au nombre d'environ quatre mille, avec Forestier qui les conduisait par l'endroit le plus épais de la forêt. Regnaut lui dit de les conduire droit à Balençon.

Quand Regnaut vit les tentes, il dit à ses gens :
— Seigneurs, voyez la belle capture que nous avons à faire !
— Messire, répondirent-ils, avançons hardiment. Tant que vous serez à notre tête, nous irions attaquer l'enfer.

L'archevêque Turpin qui était à la garde du camp, leva la tête et vit des corbeaux qui menaient un grand bruit au-dessus de Montauban. Il regarda ensuite du côté de la forêt et aperçut ses ennemis. Alors la terreur s'empara de lui. Il appela Oger le Danois et lui dit :
— Allez promptement vous armer, car voici nos ennemis qui s'avancent ; Roland et Olivier ont eu grand tort de s'amuser à chasser et de laisser l'armée en danger.

Oger alla aussitôt s'armer et fit sonner les trompettes, afin que toute l'armée fut prête. Oger monta sur son cheval et vit que toute l'armée était sur pied. Alors il dit à ses gens :
— Seigneurs, on vient nous attaquer ; pensons à nous défendre.

Regnaut fut bien surpris de voir toute l'armée en mouvement ; il dit à ses gens :
— Nous sommes découverts. Ne négligeons cependant pas de les attaquer.

Il dit ensuite à Maugis de rester dans la forêt avec mille chevaliers.
— Si vous voyez que nous avons besoin de secours, vous y viendrez aussitôt.

Maugis fit selon ce qui lui était prescrit. Regnaut piqua Bayard et passa Balençon. Le premier qu'il rencontra fut Âymerie, comte de Nicol, qu'il renversa mort. Il mit l'épée à la main et poursuivit les chevaliers avec tant de fureur qu'ils fuyaient tous devant lui, et il se prit à crier :
— Où sont Roland et Olivier ? Ils nous ont menacés et traités de traîtres. Je veux leur prouver le contraire.

Quand l'archevêque Turpin entendit Regnaut, il courut contre lui et ils combattirent longtemps l'un contre l'autre et brisèrent leurs lances, mais ils ne tombèrent pas. Regnaut lui appliqua un grand coup d'épée sur la tête, en lui disant :
— Vous auriez mieux fait de rester dans votre église.

L'archevêque Turpin, entendant le reproche que lui faisait Regnaut, courut sur lui. Alors toute l'armée se mit en émotion de part et d'autre. Il y eut un très grand carnage. Oger arriva, monta sur Broisard et frappa Richard si rudement qu'il renversa son cheval. Richard, se voyant démonté, mit aussitôt l'épée à la main, se prépara à se défendre mais Oger passa outre et commença à crier à l'enseigne de Saint-Denis. Regnaut voyant que son frère Richard était démonté, piqua Bayard et courut contre Oger. Alors ils se donnèrent de grands coups sur leurs écus. Regnaut frappa Oger avec tant de force que ce dernier ne put s'empêcher de tomber par terre. Regnaut le voyant par terre, prit Broisard par la crinière et dit à Oger :
— Vous avez eu tort de renverser mon frère ; vous qui êtes un parent, ne devriez-vous pas nous défendre ? Au contraire, vous êtes notre plus cruel ennemi ; ce n'est pas bien agir. Reprenez cependant votre cheval, mais j'espère que vous ne nous ferez aucun mal.
— Cousin, dit Oger, vous avez bien raison.

Maugis voyant que tous les bataillons étaient en ordre, sortit de son embuscade et vint à Balençon ; il passa le gué et se mit dans la mêlée. Les Français était très fatigués ; ils se mirent en fuite. Les gascons les poursuivirent environ une lieue, puis retournèrent au camp où ils prirent tout ce qu'ils y trouvèrent. Maugis alla à la tente de Roland et prit le dragon qui était au-dessus. Ils repassèrent le gué de Balençon et s'en retournèrent à Montauban avec grande joie. Maugis fit distribuer le butin à ses gens puis monta sur la tour de Montauban et y mit le dragon de Roland au-dessus, de manière que toute l'armée de Charlemagne puisse l'apercevoir. Le roi l'ayant aperçu, pensa que Roland avait pris le château.




Aller au chapitre 13    Table des chapitres
Retour à la liste des légendes    Retour à la page d'accueil

CSS Valide ! [Valid RSS]

Site optimisé pour Firefox, résolution minimum 1024 x 768 px

Flux RSS : pour être au courant des derniers articles édités flux rss