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Les artisans du mal

Sorciers et sorcières

Sites et récits

Bien que l'on se souvienne de quelques sorciers de renom, la sorcellerie fut un phénomène surtout féminin. On soupçonnait jeunes et vieilles d'avoir des rapports charnels avec le diable, de jeter des sorts, de se métamorphoser en loup, en chat, en lièvre. Entremetteuses du diable, les macrales excellaient en matière de maléfices, de marrages (du vieux français marrer : attacher, arrêter, clouer sur place par l'effet d'un sort) et d'envoûtements.

A date fixe (Chandeleur, 1er mai...) et toujours au même endroit, les sorcières organisaient des sabbats. Parfois, le diable y présidait en personne. Pour cadre de ces assemblées tapageuses, leur préférence allait à des carrefours désolés, à des sites d'ancienne justice, à des pâtures enclavées dans la forêt. Les vieux arbres et les pierres « druidiques » étaient particulièrement recherchés.

Durant les XVIe et XVIIe siècles, l'inquisition fit aux sorcières une chasse impitoyable. Des procès furent ouverts un peu par-tout, débouchant dans certaines régions sur de véritables holocaustes. Mises à la torture, les pauvres femmes avouaient n'importe quoi. Dans les meilleurs cas, les condamnées étaient relaxées ou frappées de bannissement; au pire, elles périssaient sur le bûcher. Trop souvent, l'ignorance, la délation et le fanatisme religieux furent à l'origine de ces atrocités.

Le Saut des sorcières

Entre les Hayons et Auby, une longue crête schisteuse s'élance en dents de scie au-dessus du confluent du ruisseau des Alleines et de la Semois. C'est le Saut des sorcières. Jadis, ces mauvaises y célébraient nuitamment le sabbat. Aux premières lueurs de l'aube, elles enfourchaient leur manche à balai et sautaient à reculons jusqu'au-dessus de la crête. Le maître de cérémonie était un pâtre d'Auby nommé Colas Cha Cha. Il ne se promenait jamais sans son livre de prières sous le bras ni sans son chapelet à gros grains autour du cou. Mais tout ceci n'était que simagrée. Sous cette apparence de bon chrétien se cachait un dangereux sorcier.

Un jour, une femme d'Auby l'ayant rencontré avec sa herde, le complimenta pour sa piété, lui garantit qu'après sa mort il irait tout droit au paradis. «Tu ne me connais pas encore, Marie-Anne», lui avait-il répondu d'un air terrible. Cette réponse éveilla des soupçons chez la femme qui s'empressa de raconter l'affaire. Or, quelques jours plus tard, des vaches ayant attrapé un mal mystérieux, on arrêta une femme suspectée de sorcellerie. Mise à la question, la malheureuse commença par dénoncer ses congénères puis, malgré sa résistance, elle finit par révéler toute l'organisation de sa bande. Arrêté à son tour, Colas Cha Cha fut condamné et brûlé sur le pont de la ville de Bouillon.

Le Saut des sorcières n'en resta pas moins un lieu maudit. Des diablesses continuaient de hanter la crête, et on raconte qu'elles tourmentaient les passants en expédiant à leur rencontre des mouches fantastiques appelées faunets. Ces insectes redoutables ressemblaient à des taons, et il en fallait sept pour tuer un cheval.

La Roche Magrite Zabelle

Au sud de Transinne, sur l'orée du Bois de Châmont, cette roche, légèrement surplombante, émerge des vieux taillis qui peuplent le versant gauche du vallon de Wezerin. Elle tire son nom de deux sorcières, Marguerite et Isabelle, qui avaient choisi le sommet du rocher pour tenir leurs conciliabules.

Le jour du sabbat, les macrales des environs se rencontraient au-dessus de la source de Robèfoy, entre Villance et Libin, puis, sous la conduite de la plus âgée, elles gagnaient le Bois de Châmont, lieu traditionnel de leurs festivités infernales. Chaque village d'alentour devait pourvoir au menu du sabbat sous peine de s'attirer la colère de ces sorcières très redoutées. Libin-Haut devait envoyer deux dindons ; Libin-Bas, deux oies de l'année ; Hatrival, trois jambons; Arville, trois cochons de lait; Redu, six canetons; Transinne, douze poulets; Villance, huit vieilles poules bien grasses et deux coqs ; Lesse, des truites ; et Maissin, trois hérons fraîchement abattus.

Le sabbat terminé, les sorcières enfourchaient leur balai et regagnaient leurs pénates. Mais, avant de se quitter, elles chantaient cette rengaine :

«Pour être bonne sorcière
Demandez-le au diable
Qui est ici présent,
II ne faut plus aucune dent,
II faut faire comme les vieilles
Dans le fond de l'église,
II faut s'accroupir (bis)
Sous le bénitier.» (bis)

Le Pâquis des poules

Le Pâquis des poules est un carrefour forestier situé sur les hauteurs de Gespunsart, en Ardenne française. Cet endroit, isolé en plein bois, où convergent six chemins pierreux, était jadis un lieu habituel de sabbat. Certaines nuits, le diable y tenait sa cour. Les esprits infernaux qui l'accompagnaient prenaient alors l'apparence de poules noires picorant le gazon. Tous les sorciers et les sorcières du pays s'y donnaient rendez-vous.

Un jour, trois pauvres filles furent assez imprudentes pour s'y rendre. Elles vinrent d'abord par curiosité, puis éblouies par le Malin, elles se livrèrent à lui, corps et âme, en échange de pouvoirs et d'argent. A quelque temps de là, elles songèrent à se marier avec trois garçons du voisinage. Irrité par ce projet, le diable métamorphosa les jeunes filles en trois vieilles femmes hideuses qui furent aussitôt repoussées par leurs prétendants. A ceux-ci, Satan réserva un autre sort : tous trois périrent écrasés sous un arbre. La vindicte populaire accusa les sorcières qui furent brûlées vives dans leur hutte. Le lendemain, au milieu des cendres encore chaudes, on vit trois peupliers sortir d'une même souche et grandir à vue d'œil. On les nomma le Bouquet des sorcières.

Parfois, quand le vent du nord les agitait, les arbres poussaient des gémissements, des sanglots. C'était les âmes des sorcières qui, pensait-on, demandaient des prières. Pendant longtemps, les trois peupliers furent l'objet d'une espèce de pèlerinage, particulièrement suivi par les jeunes filles désireuses de se marier. Finalement, délivrées des tourments du Purgatoire, les âmes cessèrent leurs plaintes, et le Bouquet des sorcières disparut sans que personne ne se souvienne de son emplacement.

La Roche Namousette

Sorcière pour les uns, fée pour les autres, la Namousette habitait une roche du Bois de Présnaûmont, près du village des Hayons. Elle était réputée pour son agilité prodigieuse à voler dans les airs. Ainsi, on raconte qu'après avoir mis des pommes de terre sur le feu, elle était capable, son balai entre les jambes, de filer jusqu'à Paris pour se procurer du sel et de revenir avant que les patates ne soient cuites à point!

Pierre-sans-crainte, un riche laboureur de Dohan, l'ayant un jour injuriée, elle le déposséda de tout son bien et transporta celui-ci chez un individu des Hayons, lequel fut bien surpris de se trouver tout à coup si riche. Trois jours plus tard, la Namousette rencontra cet homme, le mit au courant de l'affaire et lui demanda, en retour, de venir creuser un puits auprès de son rocher. Mais cet ingrat se moqua de sa bienfaitrice, la traita de vieille sorcière et menaça de la brûler dans sa roche. Mal lui en prit, car la sorcière lui enleva, en une nuit, non seulement ce qu'elle lui avait apporté, mais encore tout ce qu'il possédait auparavant. Le tout fut balancé dans la Semois.

Finalement arrêtée, la Namousette fut condamnée à être brûlée vive. Pendant longtemps, l'endroit de son supplice fut damné et ne produisit que des ronces et des épines.

La Pierre du diable

Dans la vallée de la Vierre, près du domaine des Croisettes (Suxy), un gros caillou, d'un mètre cube hors de terre, jouit d'une mauvaise réputation. C'est autour de cette pierre que les druides, puis les sorcières, organisaient autrefois leurs cérémonies.

Il y a plus de cent ans, trois charbonniers avaient installé hutte et faulde (meule de carbonisation) dans le voisinage du caillou. Une nuit, une main malveillante avait saboté leur travail en activant la combustion de la meule. Le lendemain, voulant sauver ce qui pouvait l'être, les trois hommes se mirent à l'œuvre jusque bien après le coucher du soleil.

Survint alors un orage qui déferla sur la forêt. Dans la lumière intermittente des éclairs, les charbonniers aperçurent des silhouettes gesticuler du côté de la pierre. S'approchant discrètement, ils reconnurent le diable entouré de douze sorcières, lesquelles dansaient, criaient, se trémoussaient devant leur très vénéré maître. Gardant leur sang-froid, les trois hommes restèrent jusqu'à la fin du sabbat. Ainsi, ils apprirent que c'était l'incendie de la meule qu'on fêtait là, le diable n'aimant pas ceux qui ont la «foi du charbonnier».

Quelques jours plus tard, les trois hommes revinrent sur les lieux accompagnés de saint Thibaut. Celui-ci, muni d'un seau d'eau bénite et de son goupillon, aspergea copieusement la pierre diabolique en prononçant plusieurs fois la formule d'exorcisme : Vade Rétro Satanas. Aussitôt, des cris de douleurs s'échappèrent du caillou et, délivrée du démon, la pierre ne fit plus parler d'elle.

Présentant en son milieu un petit évidement circulaire, la Pierre du diable est également connue sous le nom de Pas Bayard(1).

  1. Voir aussi sur ce site L'histoire des quatre fils Aymon


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