Le Cercle Médiéval en police de caractère adaptée

Légendes de Gaumes et Semois - Frédéric Kiesel

La Marie M., sorcière d'Orchimont

Bien sûr, la veuve R. n'était pas la seule sorcière à défrayer la chronique dans la région. Vers 1890-1900, plusieurs octogénaires de la région racontaient comme vrais des faits semblables, soit observés par eux-mêmes, soit racontés - notamment à propos d'une certaine Marie M. par des gens dignes de confiance. C'est ce qui fait l'intérêt de ces anecdotes: l'évidente sincérité avec laquelle elles étaient attestées.

Brouillée avec ses voisins les Deg., Marie M. leur fit périr deux chevaux, toutes leurs vaches, et une nichée de porcelets qu'ils venaient d'acheter. À la génération suivante, une épouse Deg. a rapporté que ses parents, gens sensés, lui avaient détaillé ces sorcelleries qui les avaient ruinés. Elle était furieuse quand des gens, ou même ses propres enfants, ne voulaient pas croire ce qu'elle rapportait à ce sujet. C'était, autour de 1900, au début de l'incrédulité quant aux faits de magie rustique.

Cette Marie M. était une agitée. Ne tenant pas en place, elle «voyageait» toutes les nuits semblant être partout à la fois, au courant de tout ce qui se passait au village. Souffrant d'asthme, un oncle des Deg. qui, pour mieux respirer, passait parfois la nuit assis sur le pas de sa porte, la vit se balader au cimetière. À minuit, elle s'y livrait à d'étranges pratiques, et ramassait des herbes et des ossements. Terrorisé par ce spectacle, l'oncle était rentré chez lui hagard.

Horace, dans sa Satire XII parle de cette coutume magique, dont le but est de nuire. Selon Scaliger, cité dans le Dictionnaire infernal de Colin de Plancy (édition de 1818), le guerrier scythe Abaris - qui traversait mers et fleuves à cheval sur une flèche -fabriqua avec des os du Grec Pélops, fils de Tantale, le talisman «Palladium» qui rendait imprenable la ville où il se trouvait.

Ailleurs (Bulletin du folklore, 1898) les ossements sont signalés comme talismans, notamment la clavicule, les os des doigts de pieds et les dents. Frottés sur une verrue, ils la font disparaître. Dans le Dictionnaire des superstitions du Corse P. Canavaggio(1) l'os long d'un mort est signalé comme guérissant de la fièvre quarte. En Flandre, deux os croisés sous la porte étaient censés protéger de tout mal, voire procurer un bon numéro pour le tirage au sort du service militaire!

  1. Marabout, 1979.



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