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Légendes et contes du pays de Charleroi

Châtelet

Pérsin au pot.

Il était une fois une vieille femme qui demeurait avec son fils. C'était un simple. Un jour, avant d'aller à la messe, elle lui dit de faire bouillir la soupe et d'y mettre du persil. Seulement, elle disait non pas persil comme nous, mais pérsin, car cette femme parlait wallon, d'après l'habitude du village.

La mère sortie, le jeune homme s'empresse de mettre de l'eau sur le feu et, quand il la vit bien bouillante, il attrapa le chien qui s'appelait Pérsin et le mit dedans. Le chien se débattait fort et grinçait des dents de douleur. Alors le garçon eut peur et courut retrouver sa mère à l'église.
Justement, le curé prêchait.

Le simplot entra comme une bombe et se mit à crier au curé :
- Eh! l'homme qui est dans une cuvelle! Vous n'avez pas vu ma mère?
- Chut! Chut! On lui imposa silence de tous côtés. Sa mère, qui l'avait entendu, sortit alors de l'église et demanda à son fils ce qu'il avait.
- Eh bien! Il y a que j'ai mis Pérsin comme vous me l'avez dit et il grince des dents.

- Mon Dieu ! mon garçon, répond la mère, tu as mis notre chien dans un pot? Eh bien! tu en as fait une belle!
Elle se mit à le sermonner, lui disant qu'il devait réfléchir avant de faire quelque chose.
- C'est bon, mère, répondit-il, je ferai mieux une autre fois. Deux ou trois jours après, sa mère dut partir au marché.
- Mon garçon, dit-elle avant de s'en aller, il te faut laver la cave aussi blanche que du lait.
Il se mit bravement à l'ouvrage; mais plus il frottait, plus les carreaux devenaient rouges. En voyant cela, il entra dans une grande colère, prit toutes les télés(1) et les versa sur la cave qui, cette fois, était aussi blanche que du lait.

- Mon Dieu! mon garçon, s'écria la mère à son retour, qu'as-tu fait que tout mon lait se trouve répandu sur la cave?
- Eh bien! mère, j'ai fait comme vous m'avez commandé. Ne m'avez-vous pas dit de laver la cave aussi blanche que du lait?
- Ah! que tu es bête, mon garçon! lui dit sa mère, je ne ferai jamais rien de toi.

Le lendemain, elle voulut se rendre à son ouvrage des champs. Elle s'aperçut qu'il croissait de l'herbe sur le toit de la grange :
-Tiens, se dit-elle, cette herbe paraît si belle... Si on pouvait en faire manger par le veau?

Mais le sot avait entendu les paroles de sa mère et il se mit en devoir de lui être agréable.
- Cette fois, pensa-t-il, mère sera bien contente de moi.

Il va chercher l'échelle et la met contre le toit, puis il prend une corde, la lie fortement au cou du veau et, grimpant sur le toit, il se met à tirer l'animal, qui tendait une langue longue comme ça.

Heureusement pour le veau, la mère avait oublié son panier et revenait pour le prendre.
- Oh!, le sot! lui cria-t-elle, veux-tu bien finir! Tu vas étrangler notre veau!
- Mais, mère, ne vouliez-vous pas lui faire manger l'herbe sur le toit?
- Ah! tais-toi, tu ne seras jamais qu'un lourdeau! Un certain temps, la mère ne demande plus rien à son fils. Un jour cependant, avant de partir aux champs :
- Mon garçon, dit-elle, il te faut donner à manger aux vaches, mais beaucoup! Il faut les mettre dans l'herbe jusqu'à la panse.

Le sot jeta alors un peu d'herbe sous les vaches et, trouvant qu'elles n'étaient pas dans 'herbe jusqu'à la panse, il prit la serpe et leur coupa les pattes."Quand la mère revint, voilà qu'elle trouva toutes les vaches crevées.

Elle eut beau se mettre en colère, le malheur était fait.
Le sot voulut la consoler :
- Ne pleurez plus, mère, donnez-moi les peaux des vaches, j'irai les vendre au marché.
Notre simple prend les peaux et s'en va.
Pour aller à la ville, il fallait passer par un bois. Tout à coup, il vit de loin trois hommes qui s'avançaient.
Le garçon eut peur et se sauva vite sur un arbre.
Mais voilà que les hommes s'arrêtent justement sous son arbre.
- Faisons les parts ici, disent-ils.
Et ils se mettent à compter leur argent.

- Voici votre part, dit le chef à l'un d'eux; et voici la vôtre, dit-il au second; et moi, j'ai la troisième.
Mais le sot qui se trouvait sur l'arbre, voyant ce qui se passait, laissa tout à coup tomber ses peaux au milieu d'eux en criant :
- Et la part du diable?
Les brigands, laissant leur argent au-dessous de l'arbre, s'enfuirent tout effrayés.
Alors, le garçon est redescendu. Il a ramassé toutes les bourses et est vite retourné à la maison de sa mère, qui était fort contente de le revoir et avec laquelle il a encore longtemps vécu très heureux(2).

  1. Ecuelles en terre dans lesquelles on conserve le lait.
  2. Aug. Gittée et J. Lemoine, dans Contes populaires du pays wallon, Gand, 1891.

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