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Le Cercle Médiéval en police de caractère adaptée

Les légendes d'Ourthe-Amblève

Les quatre fils Aymon

Chapitre XI

COMMENT CHARLEMAGNE ASSIEGEA MONTAUBAN, ET COMMENT REGNAUT REMPORTA LA PREMIERE BATAILLE.

Après que Regnaut eut gagné la couronne, Charlemagne appela ses barons et leur dit :
— Seigneurs, je vous prie de me conseiller comment je pourrai me venger de Regnaut. Vous savez comme il m'a irrité. Il faut faire en sorte de reprendre ma couronne. Je crains bien qu'il ne mette l'escarboucle sur son château.
— Sire, dit Roland, si vous voulez vous venger de Regnaut, il faut aller détruire son pays ; et si nous pouvons prendre le roi Yon de Gascogne, vous en ferez telle justice qu'il vous plaira.
— Neveu, dit le roi, vous avez raison, car je désire bien sûr me venger.
— Sire, dit le duc Naimes, calmez votre colère. Si vous voulez me croire, vous aurez bientôt détruit Regnaut et ses frères. Faites assembler tous vos barons afin que chacun soit prêt à la Chandeleur prochaine. Il faudra faire provision de vivres pour sept ans. Nous tiendrons alors le siège devant Montauban jusqu'à ce qu'il soit pris ; ensuite vous le rangerez sous votre obéissance.

Charlemagne approuva ce conseil. Il envoya des lettres circulaires dans tout son royaume par lesquelles il était porté que tout homme qui voulait aller à la guerre, devait se trouver à la cour du roi vers la Chandeleur prochaine avec des vivres pour sept ans. Quand les barons surent la volonté du roi, ils se préparèrent et vinrent à Paris, où ils se présentèrent au roi et à Roland son neveu. Il en arriva tant qu'ils ne purent tous loger dans Paris.

Le roi fit assembler tous ses barons et leur dit :
— Seigneurs, vous savez que j'ai vaincu quatre rois qui sont sous mon obéissance, excepté !e roi de Gascogne qui est retiré avec mes ennemis mortels les quatre fils Aymon. Aussi je vous invite à venir en Gascogne pour me venger des torts qu'ils m'ont faits.

Alors le comte de Nanteuil dit :
— Sire, nous n'irons pas pour cette fois, car ce n'est pas possible. Vous savez qu'il n'y a pas longtemps que nous sommes revenus d'Allemagne et nous sommes encore bien fatigués. Il y a encore ici plusieurs barons qui ne sont point encore retournés dans leur pays et qui désireraient y retourner. Attendez à la Pentecôte. Donnez congé à vos barons, afin qu'ils puissent se reposer, et quand il en sera temps, vous les ferez venir pour vous suivre en Gascogne ou ailleurs.

Le roi fut très mécontent de cette proposition et dit que même s'il devrait tout y perdre, il voulait aller en Gascogne.
— J'y mènerai tous les jeunes gens de mon armée et vous serez déçus.
— Sire, dit Naimes, vous ferez bien car ces jeunes gens seront bien aise d'en essayer.

Charlemagne dit :
— J'espère qu'ils détruiront le roi Yon, et quand j'aurai pris Regnaut et ses frères, je donnerai toute la Gascogne aux jeunes chevaliers.

Un espion de Regnaut qui avait entendu tout ce que le roi avait dit, se mit aussitôt en chemin. Etant arrivé à Montauban, il alla trouver Regnaut, ses frères et Maugis. Quand Regnaut le vit, il lui demanda quelles nouvelles il apportait de la cour de Charlemagne.
— Monseigneur, dit l'espion, sachez qu'il est très irrité contre le roi Yon, contre vous, vos frères et Maugis ; il manda tous ses sujets, mais personne ne voulut venir. Alors il a juré qu'il n'emmènerait avec lui que des jeunes gens auxquels il donnerait toute la Gascogne.

Regnaut dit alors :
— Ne vous découragez point ; je verrai comment Roland et Olivier se comporteront contre moi et mes gens.

Alors il s'en alla dans la salle où il trouva Maugis avec les autres chevaliers et leur dit :
— Seigneurs, je vous dirai que Charlemagne vient nous assiéger et amène avec lui une armée nombreuse. Mettons-nous bien en défense et tâchons de leur résister.
— Frère, dit Allard, ne craignez rien, ils seront bien reçus, car tant que nous vivrons et que nous vous verrons monté sur Bayard, nous ne craindrons ni Charlemagne ni sa puissance.

Charlemagne pensa au conseil que le comte de Nanteuil lui avait donné. Il dit à ses barons qu'ils se rassemblent dans le temps de Pâques pour tenir un conseil général. Quand il fut temps, chacun se prépara de son mieux. Richard de Normandie amena avec lui plusieurs nobles chevaliers et se présenta devant Charlemagne ; Salomon de Bretagne vint ensuite et amena grande compagnie avec lui. Dizier d'Espagne vint ensuite à la tête de dix mille chevaliers bien armés. Geoffroi, comte d'Avignon, amena aussi avec lui beaucoup de gens et des vivres à foison. Bertrand d'Allemagne amena aussi avec lui beaucoup de chevaliers tant d'Irlande que d'Afrique. L'archevêque Turpin y vint aussi, et le roi avait beaucoup d'attachement pour lui. Tous ces grands seigneurs furent bien reçus du roi. Lorsque toute l'armée fut assemblée, les vivres devinrent d'une cherté excessive dans Paris. Le roi, voyant cela, passa toute son armée en revue ; il la trouva composée de trente mille chevaliers, sans compter les anciens. Il appela Roland et lui dit :
— Je vous recommande la conduite de mon armée.
— Je ferai de mon mieux, lui répondit Roland.

Le roi lui fit donner l'oriflamme. Ils allèrent coucher à Blois la première journée. Charlemagne fit publier que chacun eut soin de faire porter des vivres à son armée. Ils passèrent la Gironde, puis mirent toute l'armée en bataillons. Quand toute l'armée fut disposée autour de Montauban, Roland dit à Charlemagne :
— Il me semble que vous devez donner l'assaut à Montauban.

Le roi répondit :
— Je ne veux pas endommager mes gens ; il faut savoir si le château voudra se rendre, car je finirais aussitôt la bataille.

Il envoya alors un messager au château. Les sentinelles qui le gardaient lui ouvrirent aussitôt. Quand il fut entré, il trouva un sénéchal auquel il dit :
— Je suis chevalier de Charlemagne et je désirerais parler à Regnaut.

Le sénéchal le conduisit auprès de Regnaut. Quand il fut près de lui, il le salua humblement et dit :
— L'empereur Charlemagne vous demande si vous voulez vous rendre à merci, et rendre votre frère Richard pour en faire à sa volonté, autrement il assiégera votre château, et s'il peut vous prendre, il vous fera mourir dans les tourments.

Regnaut se mit à rire et lui dit :
— Dites à Charlemagne que je ne suis point un traître ; si j'agissais ainsi, il m'en blâmerait lui-même. Mais s'il lui plaît, nous sommes à son commandement ; mes frères et moi lui rendrons le château de bon cœur, pourvu que nous ayons la vie sauve. Si le roi refuse, nous tâcherons de nous défendre.

Le messager s'en retourna et raconta à Charlemagne tout ce que Regnaut lui avait dit. Le roi se mit à réfléchir, car il sentait bien que Regnaut avait raison. Il appela le duc Naimes et Oger le Danois, auxquels il dit :
— Seigneurs, Regnaut me mande qu'il ne fera rien de ma volonté, ainsi je veux que le château soit assiégé.
— Sire, lui dit Naimes, il me semble, comme je l'ai entendu, que Regnaut vous fait une belle offre, et si vous voulez m'en croire, vous l'accepterez. Vous savez que ce sont des gens dont vous pourriez recevoir de grands services. D'ailleurs, si Regnaut était à la tête de vos troupes, vous seriez craint et révéré partout. Mais si vous voulez, nous n'y pouvons que faire. Je ne serais cependant pas d'avis d'assiéger le château, car il est bien fort, et Regnaut a beaucoup de gens pour le défendre. Si vous les assiégez, ils sortiront par de fausses portes ; autrement il faudra les serrer de près pour qu'ils ne puissent sortir.




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