Accueil --> Liste des légendes --> Table des chapitres --> Chapitre 21.
Le Cercle Médiéval en police de caractère adaptée

Les légendes d'Ourthe-Amblève

Les quatre fils Aymon

Chapitre XXI

COMMENT APRES LA DEFAITE DE L'ARMEE DE CHARLEMAGNE, ON LUI ABATTIT SA TENTE ET LUI PRIT SON AIGLE D'OR MASSIF, DONT IL VOULUT QUITTER SA COURONNE DE DEPIT.

Regnaut, voyant que Charlemagne s'en retournait, rallia ses gens pour s'en retourner à Montauban. Regnaut dit à ses frères et à Maugis :
— Demeurons derrière de crainte que les Français les suivent ; car s'ils nous suivent, nous souffrirons mieux la peine qu'eux. Je ne voudrais pas que Roland et Olivier se moquassent de nous, ni qu'ils nous trouvassent en désordre.

Quand le plus gros de la troupe eut passé Balençon, Regnaut prit trois mille hommes et dit aux autres de retourner à Montauban.

Avec les trois mille hommes, Regnaut, suivi de ses frères et de Maugis, fit demi-tour, repassa à Balençon, puis s'en alla pour attaquer l'armée du roi. Quand ils furent arrivés près de la tente du roi, Richard en coupa les cordes et la fit tomber par terre avec l'aigle d'or de très grand prix qui la surmontait. Les gens du roi, effrayés, coururent aux armes, mais furent surpris de voir par terre les tentes dont on avait coupé aussi les cordes.

Le combat fut cependant terrible ; le champ de bataille fut couvert de morts et de mourants. Maugis mit l'aigle d'or en sûreté puis revint vers le roi à qui il dit :

— Sire, vous nous persécutez depuis longtemps, mais vous vous souviendrez de votre venue en Gascogne ; je vengerai la mort de mon père et je vous donnerai un si grand coup, que vous ne ferez jamais plus de guerre à personne.

Il jeta sa lance vers la poitrine du roi, mais celui-ci évita le coup. Charlemagne cria après son neveu Roland. Entendant cela, Maugis regarda autour de lui et ne vit pas Regnaut, ni ses frères ; ils étaient repartis. Maugis partit vite pour les rejoindre. Au-delà de Balençon, il se heurta à une grande compagnie de chevaliers du roi Charlemagne. Il se battit, mais finalement dut se rendre à Olivier de Vienne qui lui promit d'intercéder auprès de Charlemagne pour obtenir sa grâce. Regnaut, ignorant tout de cela, croyait Maugis déjà parti vers Montauban.

Charlemagne, irrité et confus d'avoir été chassé de son camp par Regnaut, réunit ses barons et leur dit qu'il ne voulait plus être roi et qu'il allait abandonner la couronne de France.

Le duc Naimes, parlant au nom des barons, répondit qu'ils auraient souhaité voir finir cette guerre avec Regnaut, qui durait depuis si longtemps, mais que, puisque Charlemagne refusait de faire la paix avec les fils Aymon, il devait rester roi et que tous ses barons lui resteraient fidèles et iraient prendre Montauban. Charlemagne voulut alors qu'on lui amenât Maugis, ce que fit Olivier. Charlemagne, voyant le prisonnier, fut content et lui dit :
— Je te ferai payer chèrement ton orgueil quand tu emportas l'aigle d'or et tous les larcins que tu as commis ; tu m'as irrité plusieurs fois et j'aurai le plaisir de te punir.
— Sire, dit Maugis, vous ferez de moi ce qu'il vous plaira car je suis entre vos mains ; mais vous ne gagnerez rien à ma mort. J'ai des cousins qui sauront bien la venger par les armes.
— Ah ! larron, dit le roi.
— Je ne puis plus me défendre, dit Maugis, puisque vous me tenez entre vos mains. Quand vous m'aurez mis à mort, vous ne pourrez plus rien faire et vous serez courroucé contre moi avant qu'il soit vingt-quatre heures.
— Malheureux ! dit le roi, ne parle pas si hardiment, car je ferai tout mon possible pour te faire périr avant qu'il soit nuit et tes quatre mauvais cousins ne pourront t'en garantir, ni toi-même te sauver par tes enchantements.

Regnaut et ses frères partirent de l'armée de Charlemagne et retournèrent à Montauban. L'épouse de Regnaut vint au-devant de lui et lui dit :
— Sire, soyez le bienvenu. Avez-vous délivré Richard ?
— Oui, dit Regnaut, Dieu merci.

Alors elle embrassa Richard et ils firent ensuite des réjouissances. Regnaut demanda après son cousin Maugis. La dame répondit :
— Je ne sais aucune nouvelle.

Regnaut, fâché, retourna vers ses frères et leur dit :
— Je vous prie instamment de vous informer si notre cousin Maugis est arrivé et de le chercher dans tout le logis. Peut-être est-il allé se désarmer ?

Alors ils demandèrent à deux de leurs gens qui dirent ne pas l'avoir vu depuis qu'il était avec eux. Ils s'en retournèrent auprès de Regnaut et lui dirent qu'ils n'en avaient appris aucune nouvelle. Il en était si chagrin et si inquiet qu'il faisait pitié à voir. La dame, voyant bien le chagrin que Regnaut et ses frères avaient, tomba dans une grande faiblesse où elle fut longtemps sans reprendre connaissance. Regnaut dit alors :
— Mon cher Maugis ! vous êtes bien abandonné ; que pourrons-nous faire désormais, puisque nous vous perdons ?

Il dit alors à ses gens :
— Seigneurs, cessons nos regrets, d'autant plus qu'ils ne nous serviraient à rien ; ce n'est pas là le remède qu'il faut y apporter. Il faut aller au bois de la Serpente pour parler à l'abbé de Saint-Ladre par qui nous pourrons peut-être avoir quelques nouvelles, car je pense qu'avant vingt-quatre heures je saurai quelque chose. Adieu, mes frères.
— Vous avez bien raison, répondit Allard, mais nous irons avec vous.
— Vous n'y viendrez pas, lui répondit Regnaut.

Alors il se fit armer et monta sur Bayard. Il sortit de Montauban, arriva à Balençon, passa l'eau et trouva un page qui venait abreuver les chevaux du roi. Quand le page vit Regnaut seul et armé, il lui demanda :
— Qui êtes-vous et pourquoi êtes-vous seul ?
— Je suis des gens de Ripus et me suis échappé quand les quatre fils Aymon l'on pendu.

Regnaut lui dit ensuite.
— Que fait le roi ?

Sire, dit le page, il est bien content et a déjà oublié la perte de Ripus, car on lui a livré Maugis qu'il détestait à la mort.
— Dites-moi, dit Regnaut, Maugis est-il mort ?
— Sire, lui dit-il, il est encore vivant. Regnaut fut content, et il lui dit :
— Mon ami, je suis bien aise que Maugis n'est pas mort.

Et tout ainsi qu'il disait cela, le page s'en alla et laissa Regnaut tout seul pensant à son affaire. Regnaut se dit alors en lui-même :
— Grand Dieu ! je ne sais ce que je dois faire ni penser car si je vais attaquer Charlemagne, la nuit est déjà fort obscure, il croira que j'ai beaucoup de gens avec moi et aura peur de perdre mon cousin. Aussi, il pourrait le tuer. Mais puisque c'est ainsi, j'attendrai jusqu'à demain matin et s'il le fait conduire à la mort, je tâcherai de le défendre.




Aller au chapitre 22    Table des chapitres
Retour à la liste des légendes    Retour à la page d'accueil

CSS Valide ! [Valid RSS]

Site optimisé pour Firefox, résolution minimum 1024 x 768 px

Flux RSS : pour être au courant des derniers articles édités flux rss