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Le Cercle Médiéval en police de caractère adaptée


Légendes carlovingiennes

La famille de Charlemagne
et ses descendants

CHAPITRE XXVI

L'année terrible

Trini terna flagella Dei......
(Chron. episc. Albig.)

Il se passait alors dans le monde politique de dramatiques et sanglants événements; quoi d'étonnant que, dans la nature, de terribles phénomènes aient apparu!... Aux crimes, aux querelles barbares des princes, qui terrifiaient les imaginations, vinrent s'ajouter des prodiges qui frappaient les yeux et qui ravageaient la terre.

C'était après la révolte de Bernard d'Italie. L'empereur Louis le Débonnaire n'avait eu qu'à se montrer à Châlons avec sa puissante armée, et les rebelles s'étaient soumis. Il avait fait grâce de la vie aux chefs et à son neveu Bernard, mais, à l'instigation de la reine, il leur avait fait crever les yeux. Le malheureux roi d'Italie avait expiré peu après.

Cette atroce vengeance n'était pas dans le caractère de Louis, aussi passa-t-il bientôt de ces actes dignes d'un despote à des humiliations volontaires, exagérées. A Attigny, il se fit humble et demanda à une assemblée politique le pardon de ses fautes, qu'il n'aurait dû implorer que de Dieu devant les ministres de l'Église.

Des révoltes de peuples, des guerres avaient précédé et suivi ces événements. Les Maures avaient ravagé la Septimanie et les côtes du Midi; les Bretons sortirent armés de leurs limites; les Normands effrayèrent et pillèrent les rivages du Nord et de l'Ouest : treize de leurs vaisseaux avaient fait un si grand butin, sur trois cents lieues de côtes, qu'ils avaient été obligés de rendre libres leurs prisonniers et de les mettre à terre. La terreur était partout, la paix n'était nulle part.

C'est l'année qui suivit la désolante scène du palais d'Attigny que ces signes funestes vinrent accroître les misères et les angoisses des peuples et prophétiser encore des malheurs.

823... année terrible!... car en celle année advinrent plusieurs prodiges. La Saxe fut terrifiée par des orages comme on n'en avait jamais vu; en quelques jours, vingt-trois villes furent bruslées du feu célestiel. Sous un ciel orageux constamment attristé par d'épaisses nuées d'où s'échappait à chaque instant la foudre, on voyait les lueurs sinistres d'immenses cercles de flammes qui s'élevaient d'immenses brasiers. C'étaient les villes qui bru laient, sans qu'on pût éteindre les feux vengeurs. Puis c'étaient des populations ruinées, affolées, affamées qui couraient dans les campagnes cherchant un asile et du pain. Mais les campagnes aussi étaient dévastées. Ce n'était pas seulement en Saxe, c'était dans le reste de la Germanie, c'était en France qu'éclataient les orages. Une multitude de gens et de bestiaux furent tués par la foudre. Des grêles épouvantables ravageaient ça et là les plaines et les monts. Les moissons, les vignes, les arbres furent broyés, les récoltes anéanties. Dans plusieurs lieux ce n'était pas seulement une grêle ordinaire qui tombait, avec laquelle gresle cheurent grand nombre de vraye pierre de grande longueur, grosseur et pesanteur.

En France, un jour d'été, un peu devant soleil levant cheut, avec gresle, un grand glaçon qui avait quinze pieds de long, six de large et deux d'épaisseur.

Enfin à ces fléaux, à la guerre et aux orages, vint s'en joindre un troisième : après ces prodiges, sensuyvit grosse mortalité de gens. C'étaient là les trois fléaux du Dieu trois fois Dieu: trini terna flagela Dei, dit une chronique du temps. Heureux si les peuples, qui reconnaissaient bien là la main de Dieu, s'humilièrent et firent pénitence !

Mais si l'on était trop prompt alors à voir des prodiges dans ces événements, extraordinaires sans doute, mais tout naturels, on ne doit pas trop taxer les chroniqueurs d'exagération. Des faits analogues se sont présentés dans le cours des siècles.

On a signalé bien souvent des pluies de pierres. Des orages, avec accompagnement de grêle d'une excessive grosseur, nous sont attestés par l'histoire et parles notes des savants, et ce sont des événements dont nos contemporains ont été témoins.

Par exemple : l'orage du 13 août 1832, parti de la Hollande, s'étendit sur les bords du Rhin et, dans un espace énorme, anéantit les récoltes. Un des orages les plus terribles est celui décrit par Tessier.

Parti du midi de la France, il se divisa en deux bandes, l'une d'une largeur de 8 et l'autre d'une largeur de 16 kilomètres. Le Midi, le centre, le Nord de la France et aussi la Hollande furent ravagés et les moissons hachées.

On a constaté aussi pendant ces orages et pendant bien d'autres la chute d'énormes grêlons, vrais blocs de glace. Ainsi, lors de l'orage du 13 août 1832, on ramassa des grêlons de 120, de 140 grammes, un même de 500 grammes. A Constantinople, le 5 octobre 1831, il tomba des grêlons gros comme le poing. Le l5 juin 1829, en Espagne, la grêle était si grosse qu'elle enfonça les toits des maisons à Cazorta ; on trouva des blocs de glace de quatre livres. Enfin ce qui approche le plus des dimensions données plus haut par nos vieux écrivains, c'est un glaçon tombé pendant un orage, en Hongrie, le 8 mai 1803 : il avait au moins une épaisseur de sept décimètres, un mètre de long et presque autant de large.

Ne doutons donc pas trop de la véracité des historiens, exagérer n'est pas inventer, et surtout ne rions pas de leur crédulité : les phénomènes tout naturels ne peuvent-il pas, entre les mains de Dieu, être l'instrument de ses justes vengeances et un appel à la pénitence et à la conversion des cœurs?...



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